Une médiatrice témoigne d'une médiation difficile en entreprise
Sandrine Steger de Viry exerce le métier de médiatrice depuis 14 ans. Depuis la fin de sa formation au CNAM en janvier 2006, la médiation ne l'a plus quittée. Elle est également enseignante à temps partiel et formatrice.
La médiation, Sandrine, pour vous c’est une vocation ?
La médiation est venue à moi naturellement. Je l'ai tout d'abord rencontrée dans ma vie personnelle en l'expérimentant en tant que médiée. Cela a été une révélation. Ce que j'exprimais depuis des années sans être entendue l'a été en présence de médiateurs. C'était comme magique ! Je n'en croyais pas mes oreilles ! Puis, j'ai lu « L'esprit de la médiation » de Jacqueline Morineau... J'ai alors su que cette voie était pour moi. J'ai alors suivi une formation sérieuse et diplômante. En lien avec mes valeurs profondes, la médiation a transformé ma vision des relations humaines.
Dans quel domaine exercez-vous ?
J'ai exercé dans le pénal, puis à la Cour d'Appel de Paris. J'exerce maintenant en entreprise, dans des institutions, des écoles, mais aussi pour des couples et des familles. Je suis indépendante. Je suis également formatrice et forme aux outils et pratiques de la médiation pour plusieurs organismes.
J'ai réalisé plus de 350 médiations dans des domaines et des secteurs d'activités variés. Toutes tailles d'entreprises et tout secteurs d'activités (société pétrolière, mutuelles, informatique, agence de communication, hôtel, établissements médicaux, établissements scolaires...).
Y a-t-il un cas de médiation qui vous a particulièrement marquée ?
Une salariée était en conflit avec son manager qu'elle accusait de harcèlement. La communication était extrêmement tendue, explosive avec celui-ci. La salariée devait réintégrer l'entreprise après une tentative de séparation qui n'avait pu aboutir. Dans un contexte aussi tendu et délicat, j'ai été extrêmement vigilante à verrouiller le cadre de la médiation et à le tenir. Je sentais que le face à face, entre ces deux personnes, était tellement difficile. Pouvoir se retrouver et se dire en présence de l'autre relevait déjà de l'exploit ! C'était une incroyable et inimaginable rencontre !
Qu’avez-vous appris de cette médiation ? Quel souvenir en conservez-vous ?
Cette médiation n'a pu aboutir favorablement malheureusement. Mais elle a eu le mérite de valider que la seule issue possible de cette "histoire relationnelle" était la séparation. Qu'elle était la meilleure des solutions pour la santé morale, psychique et psychologique des deux protagonistes. Ils ont essayé. Ils ont trouvé la force et le courage de se confronter en présence d'un tiers médiateur qui leur a offert un cadre d'expression sécurisant. Je pense que cette expérience leur a permis malgré tout de cheminer et qu'elle aura été pour eux source d'enseignements pour la suite de leur vie professionnelle.
Avez-vous un moment fort à nous raconter ?
Les moments forts de cette médiation ont été nombreux, elle a été d'une telle intensité... Dès le début, lors de la première rencontre, très tendue où ni l'un ni l'autre ne se regardaient, jusqu'au point final empreint de beaucoup d'émotionnel pour chacun. Agacement, colère, indignation, agitation, nervosité, exaspération, ressentiment, écœurement, ils sont passés par tous ces états et beaucoup d'autres. Tous leurs sentiments étaient exacerbés. Peu de moments de répit sauf pendant les pauses qui s'imposaient !